La rue Fieuzet et la rue du Temple

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Après la rue de l’Hospice nous restons dans le même quartier avec les rues Fieuzet et du Temple au pied du coteau, et à l’ombre du château qui jadis surplombait la ville.

Plan du quartier (Plan Junière 1779)

1. La rue Fieuzet

Autrefois elle s’est appelée rue de Loulmet  (« du petit ormeau ») avec ses variantes rue de Lourmet ou de Lormet, baptisée rue Fieuzet peu avant 1930  rappelant  bien sûr la mémoire de Jean-François Fieuzet curé de Villemur entre 1833 et 1860.

Jean-François FIEUZET (1795-1864)

Né le 29 prairial 1795 (17 juin 1795) à Toulouse « dans l’arrondissement de Saint-Michel » fils de Guilhaume Fieuzet et, Marie Boyé. Prêtre en 1819 , la même année il est vicaire à Baziège,  à Muret, puis desservant de Tournefeuille en 1821. Il fonde avec quelques confrères les « Conférences Ecclesiastiques » (1825) Doyen du Fousseret (1828) puis de Villemur (1833-1860) Chanoine Honoraire de Saint-Etienne de Toulouse (1860).

Il est l’initiateur de la reconstruction de l’église Saint-Michel, et n’hésite pas à financer une partie des travaux avec ses deniers personnels. Il créée l’Hospice de Villemur dans l’enceinte des Greniers du Roy (1852) Enfin il établit les Frères des Ecoles Chrétiennes et des Religieuses en donnant à la commune l’ancien logis seigneurial dont il avait fait l’acquisition (1847). Rongé par la maladie il est remplacé par le curé Robert en 1859, et décède à Toulouse à son domicile 38 allées Saint-Etienne, le 14 mars 1864.

Le jardin d’enfants (ex salle du Grail)

Faisant l’angle avec la place Jean-Jaurès un petit jardin d’enfant a été aménagé en lieu et place de l’ancienne salle du Grail. Du fond de ce jardinet, la vue sur les Greniers du Roy est superbe.

La rue longe ensuite la vieille bâtisse et permet une belle vue sur les puissants contreforts qui soutiennent l’édifice.

Plus loin la petite rue traversière , « Lou cantou de la Paoulou » que nous avons déjà évoqué, rejoint la rue de l’Hospice. Quelques mètres encore et nous voici à la jonction avec la rue Saint-Louis.

Les habitations se situent essentiellement côté nord de la rue, au pied du coteau, le côté sud est occupé en grande partie par le bloc greniers du Roy / Ecole de la Sainte-Famille. En tout, une quinzaine de maisons, leur nombre a d’ailleurs peu évolué depuis des lustres si l’on excepte la démolition de la maison d’angle avec la rue Saint-Louis. La lecture des recensements de population nous en apprend davantage :

En 1836, 74 personnes occupent 20 maisons ; trente ans plus tard 51 personnes logent dans 18 maisons, ces chiffres restent stables jusqu’en 1911 pour décroître ensuite. Aucun commerce dans cette rue, quelques artisans : maçons, menuisiers, mais aussi scieurs de long, cultivateurs. Quand aux autres professions , on retrouve par exemple 7 marins en 1836, époque où la batellerie est encore très active. Au début du XXe siècle, émerge le nombre d’ouvriers d’usine (8 en 1901 et 14 en 1911) employés à la scierie Sabatié, et à la manufacture Brusson Jeune, gros pourvoyeurs de main d’œuvre.

Cette petite rue calme ne manque pas de charme, dommage que le stationnement des voitures en gâche la perspective.   

2. La rue du Temple

Entre 1583 et 1638 elle s’appelait la rue Saint-Rémézy (ou Rémisy) forme occitane de Saint-Rémi. Existait-il antérieurement une chapelle ou un oratoire consacré à ce Saint ? On n’en retrouve aucune trace… Plus tard, dans le compoix de 1645, elle prend le nom de  rue du Temple faisant référence à l’édifice cultuel qui s’y élevait,  nous renvoyant au temps lointain où Villemur devient ville protestante par la volonté de sa vicomtesse Jeanne d’Albret. Depuis cette époque, la rue n’a pas changé de nom.

Rue du Temple. « le temple vieux » se situait peut-être à droite au bout de la rue.

L’existence d’un temple à Villemur est donc très ancienne. On pense qu’il y eut un premier local provisoire dédié au culte, semble t’il dans une école ; une assemblée du Conseil de la communauté du 7 novembre 1584 rapporte qu’elle fut tenue dans le temple, après le prêche. Aucune indication de lieu n’est donnée. Précisons que le temple n’était pas un édifice à l’architecture imposante, mais une simple maison qui servait de lieu de réunion.

On peut penser que le temple décrit ci-dessus est « le temple vieux » situé au fond de l’actuelle rue du Temple comme l’explique une pièce catholique de 1627 : « le temple est éloigné de 36 pas de la muraille de la ville et de la contrescarpe du château ; il y a deux petites maisons joignant ledit temple possédées par des habitants de la R.P.R, regardant ladite muraille de la ville y ayant une petite ruelle et une petite maison après, y ayant 12 pas ou environ de la contrescarpe du château. »

Essai de localisation des temples

Après l’Edit de Nantes (1) la communauté protestante envisage de construire un (nouveau ?) temple, puisque le 22 juin 1602 on relève  un « achat à Jean Vernhes pour 500 livres par la Religion Prétendue Réformée de Villemur, une maison et un jardin confrontant avec la maison appelée l’école qui servait pour lors de temple, et ce pour y bâtir et édifier un temple. »

Les fonds ne manquent pas : le notaire Hilaire Seigne en 1599 a donné «  600 écus pour construire et aider à bâtir le temple de la présente ville » (2)  Autre don, celui de Claire Chaubard des Filhols : 400 livres tournois qu’elle a légué par son testament du 7 novembre 1584, devant le notaire Hilaire Seigne même si cette somme ne sera perçue qu’après le décès de son mari Simon Laville, en 1621. (3)

Ce « temple neuf » devait se situer sur l’actuelle place Jean-Jaurès  si on se réfère à d’autres sources (les délibérations communales) où l’on parle « du puits qui est près de la place où était anciennement le temple de la RPR » (1695) ou encore « d’un puits au coin du temple ».

Le puits en question existe toujours sur la place Jean-Jaurès.

Peut-être une de ces maisons de la place Jean-Jaurès abritait « le temple neuf »

Ces localisations ne sont que des hypothèses, il est difficile d’être plus précis vu la complexité de la lecture des livres terriers et autres sources. Même Amédée Sévène, le premier historien de Villemur posait la question : « Quel fut l’emplacement des temples ? »

Et il précise que parmi les désignations qui sont relatives aux propriétés riveraines de la rue du Temple aboutissant à la rue du Grail, on trouve au folio 134 la mention suivante : « Anthoine Laval brassier,  tient maison dans la présente ville et rue du Temple, confrontant d’un côté avec le temple vieux, du dernier jardin du temple neuf. »

Confirmant ainsi la présence simultanée des deux temples séparés par des jardins , un vaste espace appelé patus du temple ou jardin du temple.

En 1621 Louis XIII reprend la vicomté de Villemur, le culte catholique retrouve le droit de cité, même si le culte réformé reste présent ; en 1627 le culte est interdit par décision royale, les protestants sont dépossédés de leur temple donné aux pères Minimes, et malgré quelques permissivités pour l’exercice du culte, les réformés de Villemur furent finalement rattachés à l’église voisine de Verlhac-Tescou.

Rue du Temple, au fond la place Jean-Jaures et la Croix de la Mission.

Comme dans la rue Fieuzet, aucun commerce ne s’est implanté rue du Temple, où environ une vingtaine de maisons sont réparties équitablement de chaque côté de la rue que l’on devrait plutôt appeler une impasse….Il y a quelques dizaines d’année, il y avait pourtant une issue tout au bout de la rue, un chemin à flanc de coteau permettait, à pied, de rejoindre le « château » … ou plutôt aujourd’hui le square Pierre de la Voie qui domine la ville.

Rue vouée donc uniquement à l’habitat : 80 personnes y vivaient en 1836, seulement 23 un siècle plus tard. Autrefois on y retrouvait maçons briquetiers journaliers, tisserands charpentiers, chapeliers, marins. Au virage du XXe siècle ils furent remplacés en grande partie par les ouvriers des usines Brusson et Sabatié, et quelques cultivateurs.

JCF /AVH Août 2022

Notes :

(1) Edit de pacification signé par Henri IV à Nantes le 13 avril 1598, qui définit les droits des protestants en France et mit fin aux Guerre de Religion.

(2) Minutes Jacques ESTEVERIN, notaire de Villemur, ADHG , cote 3E 21752 PH/JCHR/7553

(3) TIMBAL (Antoine), notaire de Villemur (Villemur-sur-Tarn), minutes 1621-1622, f° 82 (v°) & ss., Archives départementales de la Haute-Garonne, cote 3 E 26897, PH/JCHR/9296.

Sources :

Christian Teysseyre, Nouvelle histoire de Villemur, tome 2, pp 495-496

Commune de Villemur-sur-Tarn. 1 G 1 à  1 G 7 Compoix et muancier de 1583 (ou 1585 ?), à 1641-1644 Gache-Notre-Dame.

Commune de Villemur-sur-Tarn. 1 F 12 à 1 F 18 : listes nominatives de la population, 1836 à 1866 et 1896 à 1936.

Gaston Tournier, Société de l’Histoire du Protestantisme français, Bulletin de janvier-mars 1936 (Gallica.bnf.fr).

Illustrations

Anciens noms de rues : compoix et muanciers, archives communales Villemur-sur-Tarn et ADHG. Cartes et plans: archives communales Villemur-sur-Tarn/JCF; Photographies : Jean-Claude François

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