La rue de l’Hospice (2)

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2. L’école maternelle Anatole France, anciennement presbytère.

Le second bâtiment remarquable de cette rue est l’école maternelle Anatole France, auparavant ancien presbytère de Villemur dont voici l’histoire.

Le plan cadastral de 1779 situe le presbytère sur la parcelle n° 177, avec la description suivante : « maison et jardin du presbitaire de Villemur ». C’est un vaste bâtiment faisant face à l’ancienne maison seigneuriale, avec à l’arrière une grande cour bordée par les maisons de la rue Cambon à l’ouest, rue des Faures à l’est, et rue du Sac au sud. Cette maison appartient depuis 1676 à la communauté qui l’a achetée à l’avocat Pierre Brucelles afin de doter la cure de Villemur d’une maison presbytérale à perpétuité précise l’acte. Ce vieil immeuble servira donc de presbytère de façon quasi continue jusqu’en 1908.

Pendant la Révolution, la mairie récupère l’immeuble, le presbytère émigre un temps dans la maison Vieusse, rue Pharamond, puis retrouve la rue Lapeyre les années suivantes. A la lecture des recensements de population, vont occuper successivement le presbytère, les curés Jacques Marie-Anne de Gestas (de 1817 à 1823) Guillaume Bergerot (1823-1833) Jean-François Fieuzet (1833-1860) Jean-Pierre Robert (1860-1870) et Bernard David (1870-1908). En plus du curé desservant la paroisse, vivent également dans cet immeuble, selon les périodes, entre un et trois vicaires et deux domestiques.

C’est en 1861 que la municipalité projette la reconstruction du presbytère selon les souhaits du curé Jean-François Fieuzet qui avant l’arrêt de son activité pour cause de maladie, veut doter ses successeurs d’un logement décent. (le curé Fieuzet décède à Toulouse le 30 juin 1864) Vu la vétusté de l’immeuble, on décide de le raser et de construire un bâtiment neuf. Les plans sont réalisés par l’architecte Jacques-Jean Esquié qui œuvre parallèlement à la construction de l’église. Sur le devis de 11 800 francs, 5 000  sont économisés grâce à la récupération des matériaux provenant de l’ancien presbytère.

Le gros œuvre est confié à l’entrepreneur Antoine Castella fils aîné. Très vite, dès 1863, des différents surgissent entre l’entrepreneur et la Mairie de Villemur au sujet du paiement des fonds servant à la construction. Les retards s’accumulent…Les années passent…

Pendant les travaux, le curé et ses vicaires trouvent refuge chez Madame de Voisins (née de Vacquié) moyennant un loyer payé par la municipalité à la demande de la propriétaire (1).   En 1866 logent dans l’immeuble, le curé Robert et deux vicaires Ernest Sabatier et François Verdu ainsi qu’une domestique. En juillet 1867 Mme de Voisins émet le souhait «  que dans un mois et demi Monsieur le  curé et ses vicaires rendent  libre la maison qu’ils occupent depuis plusieurs années ». Cette même année 1867,  les travaux du presbytère se poursuivent, la somme de 1.742 francs destinée à la réfection du mur du cimetière est allouée aux travaux du presbytère.

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Mai 1868 : Le maire Hippolyte Ratier recherche des fonds pour terminer les travaux et pense que la commune devra voter des crédits additionnels tout en sachant qu’il s’est déjà engagé pour la construction du clocher de l’église… Un membre du conseil municipal fait remarquer qu’il eût été plus rationnel de terminer les travaux du presbytère plutôt que de s’occuper du clocher qui n’est destiné à loger personne et dont la construction n’a pas le même degré d’urgence !

Enfin,  en juillet 1870 à la veille de la guerre franco-allemande,  Le presbytère est mis à la disposition du curé David et de ses vicaires. Les prêtres de la paroisse occuperont le presbytère sans aucun problème jusqu’en 1905  date de la promulgation de la Loi Combes (2) qui impose la séparation des églises et de l’état.

Cette loi divise profondément les français et trouble leur conscience. Les conservateurs,   favorables à l’église, s’opposent aux radicaux, farouchement anticléricaux. A Villemur le cercle radical s’agite ; un journaliste fielleux demande au maire Jean-Marie Elie Brusson et a son conseil municipal quelle est leur position au sujet du presbytère occupé gratuitement par le curé David.

Le presbytère de Villemur appartient à la commune et celle-ci peut l’utiliser à son gré et le louer en cas de nécessité.  Le  loyer du presbytère étant évalué à 200 francs par an, le maire affirme que le curé de la paroisse ne peut pas payer une telle somme. Il estime que le curé-doyen David âgé de plus de 80 ans, mérite tous les égards de la population auprès de laquelle il remplit son ministère depuis près de 40 ans; aussi répugne t’il de se prêter à son égard aux vexations qui résultent de la loi de séparation. Le maire propose, ainsi que le permet la loi, de nommer le curé David gardien de l’immeuble tout en conservant la jouissance gratuite des locaux du presbytère.

Avec l’arrivée du nouveau curé, Joseph Maurette, le presbytère émigre pendant vingt ans à l’angle des rues Lescure (auj. Saint-Louis) et Lapeyre (auj. de l’hospice) dans la maison du notaire Pongis, puis déplacé ensuite rue de l’Hospice dans l’immeuble qui fait angle avec la rue Cailhassou. C’est là que Joseph Maurette décède le 21 juillet 1940.

Son successeur, le curé Alphonse Mittou logera désormais au presbytère mis à sa disposition rue Saint-Louis.

    Le décès du curé David en mars 1908, fort opportun pour certains, permet à la commune de ne pas renouveler le bail de location du presbytère, et dans la foulée on décide de l’aménager en école maternelle. Les travaux estimés à 6.960 francs démarrent en 1911, conduits par l’architecte départemental Joseph Thillet. En 1913 les travaux sont achevés et l’école n’attend plus pour ouvrir ses portes que la nomination d’une institutrice. Le 22 novembre 1913, Mademoiselle Paule Teulet est nommée à ce poste où elle fera toute sa carrière. Deux générations de petits villemuriens, dont ma mère dans les années 1930, se sont assis sur les bancs de sa classe et ont gardé de leur maîtresse la plus grande vénération et une affection reconnaissante. (3)

 Vingt-cinq ans plus tard, sur ces mêmes bancs, je m’asseyais à mon tour, et Lucette Castanet, assistée par la bienveillante Gabrielle Chalanda, me faisait entrer dans la vie scolaire.

Angle de la rue Saint-Louis

Cette rue connut une certaine activité dans le passé  (XIXe et première moitié du XXe), avec quelques artisans tels la famille Constans serruriers de père en fils, les cordonniers Louis Maury et Jean Dental, le charpentier Pierre Malpel, et les épiciers Antoine Péfourque et Jean Beauville. Plusieurs bouchers s’installèrent également : les Sicard, ancêtres de Jean, l’ancien boucher de la rue de la République, Louis Dompeyre (boucherie chevaline) , enfin la boucherie Moussié à l’angle de la rue Saint-Louis, immeuble qui a été démoli dans les années 1970 . En face de la boucherie Moussié, les plus anciens se souviennent de la boulangerie Balthazar faisant suite à une longue lignée de boulangers : Martin Labranque dès 1827 puis Joseph Dastros et son fils Antoine-Bernard en 1866 et Courdesses plus près de nous.

“Lou cantou de la Paoulou”

Dans le premier tiers du XXe.siècle, un commerce original, le dépôt de lait tenu par Maria Laffage (La fille de l’épicier Jean Beauville) à l’angle de la rue traversière reliant la rue de l’Hospice à la rue Fieuzet. Cette ruelle était baptisée par les anciens « Lou cantou de la Paoulou » ( surnom de Paule, la grand-mère de Maria Laffage). Mais au fil du temps, la rue de l’Hospice, essentiellement passante avec l’arrivée de l’automobile, devint vite inadaptée à l’implantation de commerces. Rares furent ceux implantés ces dernières années avec une existence éphémère.

JCF /AVH août 2022

Notes :

(1) Marie Urbaine Clémence de Vacquié épouse de Marie Joseph Mercure de Voisins-Lavernière,  officier de cavalerie. Elle était la fille de Jean André de Vacquié, un ancien maire de Villemur (1790-91) ; son frère Emmanuel de Vacquié fut conseiller général de Haute-Garonne (1848-52) et conseiller municipal de Villemur.

(2) Cette loi promulguée le 9 décembre 1905 est avant tout l’achèvement violent qui a duré presque 25 ans et qui a opposé deux visions de la France: la France catholique et royaliste et la France Républicaine et laïque. Elle remplace le régime du Concordat de 1801.

(3) L’école maternelle a été baptisée Anatole-France dans les années 1965-70. Elle donne en partie sur la place Jean-Jaurès, l’écrivain et l’homme politique étant d’ailleurs très proches.

Sources :

Christian Teysseyre : fonds d’archives personnelles. Christian Teysseyre , Nouvelle histoire de Villemur, Vivre à Villemur, tome 2, pp 484-485. Commune de Villemur-sur-Tarn : listes nominatives de la population,  1 F 7 à 1 F 18 et de 1896 à 1936. Commune de Villemur-sur-Tarn. 1 G 9 : muancier, tome III, Gache Notre-Dame, 1674-1690 (1674/1690) p 90 / 506 10 juin 1677. Commune de Villemur-sur-Tarn. 1 D 3 : registre des délibérations consulaires, 1671, 23 juin-1700, 14 mars (1671/1700) page 150/293 31 mai 1676. Commune de Villemur-sur-Tarn. 1 D 22 : registre des délibérations du conseil municipal, 1860, 13 mai-1874, 8 novembre (1860/1874).

Illustrations :

Villemur-sur-Tarn. Reproduction numérique du 1 O 11. Plan d’alignement dressé par Girou, adjoint du géomètre en chef du cadastre en 1839 et approuvé en 1842-1843. Photos : J-C François.

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