Jacques-Jean Esquié

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Jacques-Jean Esquié,  (1817-1884)

Jacques-Jean Esquié n’est pas né à Villemur, au contraire de son père et de ses ancêtres paternels renvoyant aux lointains Esquié du Terme ainsi qu’aux Pendaries des Filhols. (1)  Sa place est donc légitime dans cette rubrique des personnalités célèbres de notre localité.

portrait esquie

1.Portrait de Jacques-Jean Esquié

Il est né à Toulouse au 45 rue de la Balance dans le quartier des Chalets , le 29 octobre 1817, fils de Pierre Esquié  et de Anne née Couret. Elevé dans un milieu modeste, son père est cuisinier et sa mère sans profession, sans fortune familiale, il interrompt ses études au lycée et se place comme commis chez un papetier. Il suit cependant les cours du soir de l’école des Arts et Sciences, et encouragé par son maître Urbain Vitry, il entre dans la classe d’architecture de cette école et y obtient toutes les récompenses. C’est à Paris qu’il poursuit son apprentissage à l’Ecole des Beaux-Arts où il choisit pour maître d’atelier Félix Duban, chef incontesté de la nouvelle génération romantique.

vitry et duban

2.Les deux maîtres d’Esquié : de g à dr, Urbain Vitry (1802-1863) et Félix Duban (1797-1870)

Il revient à Toulouse en 1844 comme adjoint de Jean Bonnal, architecte de la ville. En 1845 son projet pour la construction d’un théâtre à Toulouse est retenu, mais faute de moyens, la ville abandonnera cette entreprise.
Cette même année débute sa collaboration avec Eugène Viollet-le-Duc pour ses premiers relevés à la Basilique Saint-Sernin.

portrait viollet le duc

3.Eugène Viollet-le-Duc par Nadar

En 1848 il devient le premier architecte du diocèse de Toulouse, lors de la création de ce service qui avait pour mission la surveillance des travaux sur les édifices religieux. Il commence alors la restauration de la cathédrale Saint-Etienne de Toulouse qu’il n’abandonne jusqu’en 1868 lorsque cesse sa fonction.

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4.Basilique Saint-Sernin de Toulouse

En 1849 il succède comme architecte départemental à Edmond Chambert destitué pour raisons politiques, et reste à ce poste pendant près de vingt ans. De ce fait il obtient la charge de l’entretien, l’aménagement mais également de la construction des édifices départementaux. En 1850, il obtient une médaille d’or à l’exposition des produits des Beaux-Arts et de l’industrie pour la construction de l’église de Saint-Martin-du-Touch édifiée entre 1846 et 1847, et cette même année il est désigné secrétaire du conseil départemental des bâtiments civils.
À partir de 1852, il réalise divers établissements scolaires, une mairie-école à Noé et une halle à Launac. Il restaure et entretient les églises de Longages, Lherm, Martres-Tolosane, Venerque, Saint-Lys, Fenouillet puis celles de Saint-Léon et Saman en 1856.

batiments esquie

5.De gauche à droite : la mairie de Castelginest, la halle de Launac, l’église de Gagnac et la mairie de Lanta.

delaye marchant

6.Le rapport Delaye / Marchant

La réalisation de l’Asile de Braqueville (2) représente un de ses plus prestigieux chantiers. Il dessine un premier plan en 1850.
Pour le réaliser, il s’appuie sur le programme médical rédigé par deux disciples d’Etienne Esquirol,  les docteurs Delaye et Marchant.  Dans ce rapport, les deux aliénistes toulousains posent le cadre de l’asile qu’ils souhaitent voir construire.

hopital marchant

7.L’hôpital Gérard Marchant

Les travaux ne débuteront, quant à eux, qu’en 1852. Le chantier de l’Asile de Braqueville est d’une rare ampleur. La main d’oeuvre est abondante, et des malades de La Grave sont mis à contribution pour certaines tâches. Les travaux ne s’achèvent qu’en 1864, soit 12 ans après leur commencement.
Cette relative lenteur semble largement imputable aux manques de crédits. Handicap accentué par l’augmentation du coût des matières premières et de la main d’oeuvre.
L’Asile de Braqueville est un chef d’œuvre d’architecture, reconnu internationalement. C’est son œuvre maîtresse qui, à peine terminée, reçoit un hommage majeur : deux articles dans la revue d’architecture la plus importante de l’époque, et un deuxième prix d’architecture à l’Exposition Universelle de Paris en 1867.« C’est le seul édifice du XIXe siècle de Haute-Garonne qui ait une telle importance historique, artistique et patrimoniale. » rappelle Odile Foucaud. (3)

prison saint michel

8.Prison Saint-Michel (Toulouse)

Dès 1854, il conçoit les projets de la Maison d’Arrêt de Toulouse (les travaux commencent en 1862) et des abattoirs de Grenade terminés en 1863.
Il travaille également sur trois projets pour Toulouse qui n’ont pas été réalisés : marchés couverts pour la place des Carmes et la place de la Pierre, (aujourd’hui place Esquirol) la halle aux blés, (Place Dupuy) et un projet de Grand théâtre avec Urbain Vitry.
Les années 1850-1868 font partie des plus actives de sa carrière : détenant les fonctions maîtresses du département en matière d’architecture il constitue une référence au plan professionnel ; son talent est reconnu de tous, ses adversaires ne peuvent le contester et les commandes privées et publiques affluent.

 

plan des fondations

facade eglise

9.Eglise Saint-Michel : façade
Plume sur calque. Signé, daté du 31 mai 1856

C’est dans cette période faste que Jacques-Jean Esquié est sollicité par la municipalité de Villemur concernant la reconstruction de l’église Saint-Michel. Ce choix  s’est imposé naturellement , lui dont les ancêtres sont villemuriens de vieille souche  et gageons qu’Esquié ne s’est pas fait prier pour se mettre à la tâche.
Ce projet c’est surtout celui du curé Jean-François Fieuzet qui, arrivé depuis 20 ans s’est vite rendu compte de l’état de délabrement de l’église Saint-Michel. L’édifice ne représente aucun intérêt architectural et son objectif est de donner à Villemur et à ses paroissiens une église digne de ce nom. Il va trouver un allié de poids en la personne d’Antoine Brusson, le maire, de surcroît entrepreneur de travaux publics et le 10 août 1856, le conseil municipal, approuve le plan du projet de l’église de Villemur, ainsi que son devis estimatif. La première pierre est posée le 24 juin 1857, l’église est consacrée le 3 novembre 1863 mais il faudra attendre la mi-1875 pour voir le clocher terminé.

eglise saint michel

10. L’église Saint-Michel de Villemur. Au centre, coupe longitudinale, plume sur calque . Signé, daté 31/5/1856 ( Y.Godefroy)

On doit également à Jacques-Jean Esquié les plans du presbytère dont la reconstruction a été décidée en 1861 sur l’emplacement d’un immeuble ayant appartenu au curé Fieuzet, face aux Greniers du Roy. L’entrepreneur Antoine Castella  assurera la construction de l’immeuble qui sera livré au curé David en 1870. Ce n’est qu’après son décès et les lois de 1905 que l’ancien presbytère désormais propriété de la commune deviendra l’école maternelle en 1913.(4)

Revenons à la carrière d’Esquié. En 1860 il est nommé officiellement inspecteur du chantier de rénovation de Saint-Sernin sous la direstion de Viollet-le-Duc et entreprend une première série de travaux qui s’achèveront en 1864. Il réalise encore quelques écoles à Carbonne, Aussonne et Rieumes où il construit également la halle. En 1864 il entre à l’Académie Impériale des Sciences, Inscriptions et Belles-Lettres de Toulouse, puis il reprend les travaux à Saint-Sernin de 1865 à 1869, construit également quelques immeubles de rapport à Toulouse ainsi que l’église de Beaupuy.
Mais architecture et politique ne font pas bon ménage : en 1867 il est contraint de démissionner de sa fonction d’architecte du Département, remplacé par le légitimiste Chambert qui le supplée aussi au poste d’architecte du diocèse.
Après la proclamation de la République en 1870, le nouveau maire de Toulouse fait révoquer Esquié du chantier de restauration de Saint-Sernin. Pendant les dernières années de sa vie il écrit de nombreux mémoires, en particulier pour l’Académie des Sciences.

obseques

11. Obsèques de J-J Esquié

 

Malade depuis de nombreuses années, il s’éteint à Toulouse le 2 janvier 1884 à son domicile du boulevard Saint-Aubin, ses obsèques ont lieu le lendemain « sur la paroisse Saint-Etienne au milieu d’une grande affluence. »
Jacques-Jean Esquié s’était marié En 1851 avec Louise Mélanie Salles. De cette union naquit Pierre Joseph Esquié, architecte comme son père, grand prix de Rome d’architecture en 1882, puis professeur à l’Ecole Nationale des Beaux-Arts.
En 1884 Pierre-Joseph Esquié, palliant au retard du sculpteur Maurette, s’occupa de la mise en place de la chaire de l’église Saint-Michel de Villemur.

 

 

JCF / AVH mai 2019

(1) Le Terme dans la plaine et les Filhols dans les coteaux sont deux hameaux dépendant de la commune de Villemur-sur-Tarn.
(2) Aujourd’hui Centre Hospitalier Gérard Marchant. En 1937, les asiles deviennent des hôpitaux psychiatriques. C’est alors que l’asile de Braqueville prend le nom de son fondateur et devient l’hôpital psychiatrique Gérard Marchant.
(3) Maître de conférences en histoire de l’art contemporain à l’Université Paul Valéry de Montpellier.
(4) l’actuelle école maternelle Anatole France.

Sources :
– Pour retracer la vie et la carrière de Jacques-Jean Esquié, j’ai largement puisé dans l’article écrit par Odile Foucaud, paru dans les Annales du Midi (Année 1986 98-174 pp. 237-255) et intitulé : « L’architecte toulousain Jacques-Jean Esquié (1817-1884) et le rationalisme architectural du XIXe siècle »
– Répertoire des architectes diocésains du XIXe S. Direction Jean-Michel Leniaud. http://elec.enc.sorbonne.fr/architectes/
De Braqueville à Marchant 150 ans d’Histoire. Mairie de Toulouse et Conseil Général de la Haute-Garonne.(sept 2018)

Crédit photo :
1, 6 : 
Mairie Toulouse/C.Gde la Hte-Gne. 2, 3, 4, 5, 7, 8 : wikipedia. 10 :  coll. J-C François.  9, 10 et calques Esquié : coll. Yvon Godefroy. 11 : Journal de Toulouse du 4-1-1874 Rosalis bibliothèque numérique de Toulouse

 

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