Cheveux d’Ange : cette fois, c’est fini !

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Cheveux d’Ange : un savoir-faire volé et de la casse humaine

 

fin cheveux ange

Un des derniers moments de présence des ouvriers de Brussanages dans l’usine avant que l’entreprise ne pille les lieux Photo DDM, archives, NSA.

L’affaire, cette fois-ci est malheureusement définitivement pliée. S’il y a deux mois encore, il était possible de déguster les célèbres vermicelles Cheveux d’Ange, désormais il n’y a plus aucun espoir d’en avoir dans son bouillon. La petite pâte l’ a totalement bu ! Liquidée à l’automne dernier, la société espagnole Brussanges a regagné ses terres. Elle ne laisse derrière elle que des vestiges de sa présence bessieraine, et quatre vies brisées. La célèbre machine, inventée à Villemur-sur-Tarn, a franchi les Pyrénées malgré les pressions pour l’en empêcher.

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La presse a été démontée et expédiée en Espagne !  Photo archives DDM / E.H

L’affaire était donc calculée, et il ne s’agissait pas, comme l’affirmait la dirigeante espagnole, « d’effectuer quelques réparations avant de la faire revenir». Le mensonge était entier. Tous le sentaient et le criaient haut et fort. En vain.
Une nouvelle fois, des patrons escrocs, aujourd’hui impunis, s’emparaient d’un savoir-faire et d’un patrimoine local inimitable, car cette machine était la seule capable de fabriquer ces vermicelles ultra-fins dont seuls quelques exemplaires sont encore dans nos placards.
Savourez ces instants ! Ne saurait-on conseiller aux gastronomes, ce patrimoine culinaire partagé depuis sur les tables plus de 140 ans ne sera bientôt qu’un joli souvenir !

En recherche d’emploi

Mais il y a pire. En quittant leur terre natale, les Cheveux d’Ange ont fait une plus grande casse.
Quatre employés qui s’étaient investis à la reconstruction de leur usine après l’incendie des locaux de Villemur, avaient eux aussi cru en un réel avenir. Une fois même, l’idée de développer le produit à travers une labellisation bio, avait germé. Elle est morte presque aussitôt. Puis le distributeur Panzani a selon Brussanges, rompu un contrat et «signé la mort de la société».
Enfin, il y a eu ce jour noir de juin 2018 où l’accès de l’usine a carrément été interdit aux salariés. Les serrures sont changées, les grilles cadenassées. Un procédé d’une autre époque. «Une honte ! on nous vole notre métier», clament alors les ouvriers…
Mais la douleur et les larmes ne suffisent pas à appuyer des lois françaises qui interdisent pourtant de tels agissements…
Chargé, le dernier camion un temps retenu finit par quitter les lieux, direction le sud de l’Espagne, avec la machine à pâtes.
Il ne reviendra jamais…

En ce début d’année 2019, la colère est passée chez ces courageux travailleurs mais les stigmates sont là : « Je me relève juste d’une maladie pénible. Mes anciens collègues ont le moral au plus bas. Nous avons tous cinquante ans et plus et l’on ne trouve pas d’emplois. Il a fallu aussi vivre cinq mois sans salaire. On se dit que certains ne font vraiment pas cas de l’humain. J’espère que l’on va réussir à trouver un job, mais ça va être dur…», confie Chantal Lacroux l’ancienne chef d’équipe.
Les bâtiments sont aujourd’hui à la vente. Sans doute reste-t-il quelques palettes de pâtes dedans mais elles ne rejoindront jamais le moindre rayon.
Les Cheveux d’Ange ont fini d’exister. Molex en 2008, Brussanges en 2018. Quel sera le prochain sur la liste ?

Emmanuel Haillot
Publié le 29/01/2019 dans « La Dépêche du Midi » 

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