La peste à Villemur 1628-1630

Commentaires fermés sur La peste à Villemur 1628-1630 Regards sur le passé. Faits marquants, anecdotes et histoires insolites

La peste à Villemur 1628-1630

 

 

« Ce que l’on apprend au milieu des fléaux,
c’est qu’il y a dans les hommes plus de choses à admirer que de choses à mépriser »
Albert Camus (« la peste »)

Les événements que nous subissons depuis plusieurs mois, nous remettent en mémoire que l’humanité a subie depuis des temps immémoriaux des fléaux dévastateurs. Notre région n’a pas échappé à ces épidémies et ce, de façon récurrente pendant plusieurs siècles. Lèpre, choléra, écrouelles, grippe espagnole se sont ainsi manifestés mais c’est la peste qui a certainement laissé une trace indélébile dans la mémoire collective. Cette épidémie est sans commune mesure avec celle à laquelle nous sommes confrontés aujourd’hui, mais on retrouve bien des similitudes dans l’approche, les rapports, les attitudes, les mesures prises envers cette maladie.

 

Au printemps de l’année 1348, la Peste Noire arrive à Toulouse et fait des ravages jusqu’en 1350 : 15% à 30% de la population toulousaine est décimée. C’est le plus grand fléau qu’a connu l’Europe à ce jour : cette épidémie qui aurait fait 30 à 40 millions de morts, est rémanente pendant plus de quatre siècles. A cela s’ajoutent les conséquences des conflits de l’époque, la Guerre de Cent ans en particulier avec son cortège de transfert de populations, de faillites, disettes, famines…

plan toulouse

1. D’après le plan de Toulouse de Melchior Tavernier 1631

En 1506, Toulouse est à nouveau décimée par une peste, on compte plus de 3000 morts en ville. Le modeste hôpital de La Grave situé contre la muraille de Saint-Cyprien depuis la fin du XIIe siècle, devient un lieu d’isolement des pestiférés à la demande semble t’il des Capitouls. Agrandi entre 1508 et 1514 il prend alors le nom d’Hôpital Saint-Sébastien (avec Saint-Roch, un des saints invoqué pour combattre ce fléau).
Entre 1508 à 1544, cet hôpital héberge les pestiférés dans un pavillon à l’abri du mur d’enceinte et à l’écart des autres pensionnaires : mendiants, enfants trouvés, invalides, incurables, aliénés et prostituées. En 1577 devant les pestiférés qui affluent à Toulouse et en particulier à l’Hôpital Saint-Sébastien, il est décidé de les enfermer dans les tours des remparts voisins, (notamment la tour Taillefer) puis de les isoler dans les prés des Sept-Deniers et de Bourrassol ou encore sur la colline de Terre-Cabade.
La peste fait sa réapparition de façon très brève au cours de l’été 1607 où elle est signalée à Castelnau-d’Estrétefonds et Cadours, début septembre à Grenade et Bruguières, enfin à Toulouse. La propagation de la maladie est contrôlée, s’apaise avec l’hiver, puis repart au printemps conservant sa virulence jusqu’à l’été. En décembre 1608 quelques cas se déclarent, ultimes soubresauts de l’épidémie qui s’éloigne de Toulouse. Aucun signalement à Villemur.

La pandémie des années 1628-1631, comment elle parvient en Midi Toulousain

La guerre de Trente Ans est une guerre religieuse et politique qui dévaste l’Allemagne au XVIIe siècle. Conflit d’abord religieux entre les princes protestants de Bohême et la maison des Habsbourg, souveraine du Saint-Empire, elle dégénère en guerre européenne du fait de l’intervention de puissances étrangères, essentiellement la Suède et la France. La fuite de populations, les déplacements de troupes sur fond de misère et de famine, répandent la contagion. En provenance d’Italie, les armées du duc de Mantoue traversant Lyon y apportent la peste. La capitale des Gaules est alors le grand centre d’affaires du royaume. Des commerçants de tout bord viennent s’y approvisionner. Par la suite, de ville en ville, hommes et colis transportant de précieuses marchandises mais aussi d’invisibles germes, vont semer la désolation tout au long de leur route jusqu’au Midi Toulousain.

Le 19 août 1628 débute l’épidémie de peste la plus meurtrière à Toulouse au XVIIe siècle : environ 10.000 morts sur un total de 50.000 habitants. Une véritable hécatombe même si ces chiffres sont approximatifs car il n’y a pas de recensements à cette époque.

La peste à Villemur et ses environs.

Plusieurs sources sont à notre disposition pour suivre l’évolution de l’épidémie durant cette période. Ces différentes informations s’ajoutent, se recoupent, se complètent, nous permettant de mieux comprendre la vie de la communauté et les mesures prises pour endiguer la contagion de ce fléau :
– Les registres des délibérations du conseil municipal. 
– Les minutes des notaires de Villemur dont certaines, concernant cette période ont été dépouillées par Jean-Charles Rivière. Elles sont riches d’enseignements.
– Les registres paroissiaux malheureusement peu exploitables car en très mauvais état.

vicomte de villemur

2. La vicomté de Villemur au XVIIe siècle d’après la carte de Cassini.

En 1628 la Vicomté de Villemur fait partie du domaine royal, rachetée par Louis XIII en 1621.
A l’intérieur de cette Vicomté, s’étirant dans la vallée et sur les coteaux bordant le Tarn, d’Ouest en Est, douze consulats :  Bonrepos, La Vinouse, Puilauron, Villebrumier, Varennes, Villemur, Le Born, Montgaillard, Vilette, Montvalen, Layrac, et Mirepoix .
Le plus important de ces consulats est Villemur ;  il comprend les paroisses de Villemur, Magnanac, Le Terme, Sayrac, Bondigoux, La Magdeleine, Sainte-Escariette et Villematier. En 1628 Villemur est au plan administratif un consulat, à savoir une communauté d’habitants dirigée par des consuls, cette forme de gouvernement étant héritée du passé, concédée, pour ce qui concerne la ville, par la charte de franchises ou coutumes datant de 1178. (1)  La communauté municipale formant le Consulat  de Villemur est régie par une administration constituée de 4 consuls, d’un syndic chargé de défendre les intérêts de la communauté, et de 24 conseillers politiques.

⇒ Rappelons encore que cette époque est très tourmentée dans la région. On assiste aux derniers prolongements des guerres de religion et aux ultimes velléités des montalbanais qui se déchaînent au cours de l’année 1628. Après le départ des troupes du duc d’Epernon qui assiègent la ville, les hommes de Saint-Michel, gouverneur de Montauban, pillent la région jusque sous les murs de Villemur. Les tensions s’apaisent après la signature de la Paix d’Alès le 28 juin 1629.
Les places de sûreté sont supprimées et les montalbanais ont du mal à accepter leur reddition et le démantèlement de leurs fortifications. Richelieu envoie son conseiller Monsieur de Guron pour apaiser les tensions. Ce dernier entre dans Montauban le 18 août ; en contrepartie, des otages sont transférés au château de Villemur. Après la visite en personne de Richelieu et des concessions de la part des deux camps, Montauban se soumet, les fortifications sont démantelées. Mais les troupes nombreuses qui sillonnent la région sont la cause de bien des désagréments pour la population. En août 1628 les consuls de Villemur se plaignent auprès du gouverneur La Molière de l’attitude des hommes de la garnison, le priant «d’empêcher les soldats et les goujats de faire des dégâts dans les vignes comme constaté précédemment.»

Au début de la période concernée par cette épidémie quatre consuls sont à la tête de la ville : Noble Marc Antoine de Clédier sieur de Sagnes, (1er consul) Bertrand Cambon,(2e consul) Jean Savières (3e consul) et Georges Barrié (4e consul). Ils sont régulièrement secondés par le syndic Barthélémy de Jully, écuyer, et le procureur du Roy, Guillaume Pendaries.
Dans cette période de crise, le juge royal Jean-Antoine Dispan, conseiller du Roy participe régulièrement aux délibérations, il est chargé de la justice dans la vicomté de Villemur. ( ) De façon très épisodique, le gouverneur de Villemur, Augustin Loysellier sieur de La Molière préside la séance. Il ne sera présent qu’à cinq reprises.
Les consuls et le conseil politique sont renouvelés tous les ans lors de la mutation consulaire, en date du 23 juin.

Entre le mois d’août 1628 et la fin 1630, nous avons retenu les faits marquants glanés au fil des 42 délibérations qui ont été dépouillées ;  plutôt qu’un résumé nous avons conservé un maximum de faits qui nous ont paru pertinents. Nous avons aussi volontairement conservé l’écriture originelle pour les citations . C’est presque au jour le jour que nous allons suivre l’évolution de l’épidémie.

 

Séance du 20 septembre 1628 :

gilles le mazuyer

3. Gilles Le Mazuyer

Quelques jours après l’apparition de la peste à Toulouse, des nouvelles inquiétantes parviennent à Villemur. Le juge Jean-Antoine Dispan accompagné d’un des consuls, Jean Belon, est dépêché à Toulouse afin de rencontrer le premier Président du Parlement Gilles Le Mazuyer ainsi que « messieurs les Capitouls. » Il s’agit de s’enquérir du danger réel de « la dicte maladie » (la peste n’est pas citée) et voir si on doit empêcher le commerce des habitants de cette ville avec ceux de Toulouse.
Le sieur de Bassivière, lieutenant de Monsieur de La Molière, gouverneur de la ville est prié de se mettre en rapport avec les consuls au sujet de la garde de la ville et de l’entrée et la sortie des forains ( étrangers à la ville) et habitants.

 

 

Séance du 26 septembre 1628 :

Dans les jours qui suivent, le sieur de la Molière, jugeant la garde des portes de la ville insuffisante, met à disposition une compagnie de 80 hommes de sa garde … qu’il faudra payer 5 sols par jour et par soldat, argent à prendre sur les 500 écus reçus par le Sieur Jully, syndic de la ville, sur la dotation du diocèse.
Les nouvelles provenant de Toulouse son alarmantes, ceux qui le peuvent fuient la ville, les délibérations du conseil de ville rapportent : « la contagion est tellement eschauffée dans la ville de Tholose que les principaux habitans de ladicte ville quittent icelle et vont loger aux champs », les marchands mettent leur marchandise sous clef, la ville est déserte !

auger ferrier

4.Buste d’ Auger Ferrier – Marc Arcis – Musée des Augustins, Toulouse

Dans ses écrits sur la peste à Toulouse, Joseph Roucaud nous rapporte le désarroi de la population face à l’apparition de la peste,  la tendance que riches, magistrats et hauts-fonctionnaires avaient de fuir la ville et se réfugier à la campagne « où d’ailleurs le mal ne tardait pas à les suivre ». En parallèle à ces actes de faiblesse et de défaillance, il cite de nombreux actes de dévouement et de courage « en particulier l’abnégation des Capucins, et le courage tranquille du premier président du Parlement Gilles Le Mazuyer, qui mourut à la tâche». (Décédé le 10 octobre 1631)

En 1548 le prestigieux médecin toulousain Auger Ferrier avait écrit : « Le plus souverain remède que l’on sache pour se garantir de la Peste, c’est se retirer bien tôt du lieu infect et s’en aller loin et revenir tard. » Cette formule est empruntée à Galien, célèbre médecin grec de l’antiquité qui résumait ainsi la conduite à tenir par les trois lettres CLT : Cito, Longe fugeas et Tarde redeas.

Séance du 15 octobre 1628 :

Devant ce danger si proche, il serait dangereux de commercer avec Toulouse, vu le manque de remèdes dont dispose Villemur.
On met en place des mesures strictes : « deffences seront faictes à tous habitans de la ville et visconté de Villemur, de quel estat et condition qu’ilz soinct, de n’aller en la ville de Tholose ny avoir aucune frequentation avec les habitans d’icelle à peyne de dix livres d’esmende et d’estre privés comme ilz sont dès à present comme par lhors de l’entrée de la present ville »
Malgré ces interdictions « les sieurs Busquet, le Recteur, le Juge et autres », ont enfreint la loi et se sont rendus à Toulouse. Conséquence, l’entrée de la ville leur est interdite et on leur somme de rester à l’écart, trois ou quatre jours aux champs ! Les contrevenants protestent auprès de M° Jean Esteverin et Hugonnenc, notaires, qui plaident la clémence. Justice est rendue, ils peuvent rentrer en ville à la condition expresse de rester cloîtrés chez eux sans voir quiconque « à peyne que ceux quy les frequenteroict seroinct enfermés comme eux »
Et pire encore, on menace les habitants de « n’avoir aucune frequentation par sy apprès dans ladicte ville de Tholose ny avec les habitans d’icelle à (sous) peyne d’estre tués et leurs maisons bruslées. » Voilà qui est clair et dissuasif !

Séance du 20 novembre 1628 :

D’autres mesures draconiennes sont prises :
Les consuls, par la voix du Sieur de Sagnes informent qu’ il est nécessaire de mettre un garde à chaque port (le port-haut et le le port de la ville) pour vérifier les passeports de quiconque voudra traverser la rivière ; il est également interdit à toute personne étrangère à la vicomté de venir à Villemur les jours de marché muni ou non de passeports et il est prescrit aux gardes « d’en laisser passer pas ung » Il est également défendu au meunier du moulin de la rive gauche (le moulin du Pas) de venir en ville et aux habitants de la vicomté d’aller y moudre sous peine que l’entrée de la ville leur sera refusée étant donné que « toute sorte de gens des lieux deumeurans de Tholose viennent mouldre audict molin ».

Séance du 14 mars 1629 :

l’épidémie se développe, un nommé Groussac est mort dans la maison de Simon Dulau, paraît-il du « mal contagieux ». La maison où vit Delau et sa famille a été isolée, et en raison de leur extrême pauvreté, on est contraint de leur fournir vivres et aliments. Le 14 avril le juge Dispan alerte l’assemblée sur le fait que « depuis quelque temps, la maladie s’est glissée dans deux maisons de la ville, qu’elle persiste dans deux ou trois autres, et que si l’on ne prend pas d’autres mesures, il est à craindre « qu’à cauze de la frequentation que les soldatz ou habitans pourroinct avoir alentour desdictes maisons, ladicte maladie ne se fourre dans toute la ville et ne perde entierement icelle »

Séance du 14 avril 1629 :

Ces craintes sont entendues par le conseil de ville qui décide que les habitants des maisons infectées « seront sortis de la ville » en un lieu où « seront basties de cabanes à l’esfect de leur loger et leur sera administré les vivres et mediquemens necessaires. »
Les affaires sont rondement menées et le 18 avril le juge Dispans annonce que « les malades et pestifferés (c’est la première fois que ce terme est employé) quy se sont treuvés dans la present ville ont esté sortis d’icelle et remis dans la tuilerie ». (2)
Cette dernière précision est d’importance car elle permet de préciser l’endroit où ces malheureux sont logés, dans un lieu situé au terroir des Condomines, non loin de l’ancien hôpital Saint-Jacques. C’est ici que se trouvaient les terrains des briquetiers et tuiliers, entre le cimetière actuel et la route menant aux Filhols. (Voir le plan ci-dessous)  On sait par ailleurs qu’en 1635 c’est Jean Belon, bourgeois de Villemur qui gère la « thuilerie de Sa Majesté » qu’il a donné en fermage « à Jean Aguerré maistre thuilier du village de Cambie et Pierre Pumez thuilier du village d’Anglet près Bayonne » (Jean Bascoul notaire, 11/01/1635 minutes 1635-36 f°xv, ADHG 3E 21795)

accueil des pestiferes

5. Lieu d’accueil des »pestiférés » aux tuileries

Deux testaments reçus par des notaires de la ville nous confirment le lieu d’isolement des « pestiférés ». En premier lieu celui de Pol Saignes compagnon cordonnier de la ville d’Auch qui a été infecté « dans la maison de feu Antoine Deltheil, cordonnier, mort de l’infection » ; il se dit pourtant gaillard, sans être atteint d’aucune maladie – il est donc mis à l’isolement « près de la tuylerie de sa majesté » – il fait toutefois son testament « par précaution »  (Notaire Jean Bascoul le 27/11/1629. minutes 1629, f°492, ADHG, 3E 21789)
Le second testament est celui de Pierre Rogier, sellier, lequel « se sentant indisposé de son corps » est lui aussi à l’isolement sur une pièce de terre propriété de François Lamothe, « proche le chemin appelé des Thourons dans lequel chemin et aux huttes qui ont été faites pour mettre ceux que l’on pourrait trouver frappés de la maladie contagieuse » Le testateur n’a pas osé signer.  (Notaire Jean Esteverin 9/12/1629 ; minutes 1628-29, f°886, ADHG 3E 21814)

Séance du 18 avril 1629 :

Comme il est demandé par le juge Dispans, les consuls se mettent à la recherche d’un « sirurgien » (3) (dans le texte) qui aura la charge de de les soigner et medicamenter les malades, et vu que  dans cette ville il n’y a aucune drogue et médicaments, il est donné pleins pouvoirs à M. Jean Bories apothicaire d’en acheter, à Toulouse où autre ville, à concurrence de 200 livres,  lesquelles drogues seront apprès par luy distribuées aux habitans malades ou pestifferés de ladicte ville »
On évoque ensuite le cas d’un certain Milhomme « ung des pestiférés » qui est chargé d’évacuer les contagieux hors de la ville. Il faudrait lui adjoindre un aide et les rémunérer aux frais de la communauté. Un certain Jean Sergue est quand à lui chargé d’apporter de la nourriture aux malades, également de les recenser et d’en faire le rapport aux consuls.
Il est arrêté enfin l’interdiction aux « medecins, appothicaires et sirurgiens de ceste ville » de ne visiter aucun malade sans qu’au préalable ils n’en aient avertis les consuls.
Le syndic Jully annonce que le Sieur Vinhes, « maistre d’escholles » qui avait cessé de faire classe à cause de la maladie contagieuse, pour « éviter la fréquentation » pourra, avec l’autorisation de la communauté, continuer d’instruire la jeunesse dans les dites écoles.

Séance du 6 juin 1629 :

Le syndic Barthélémy Jully s’inquiète du sort des contagieux qui se trouvent à la tuilerie, hors la ville « Ils ont fait leur quarantaine et même davantage… qu’est ce qu’on doit faire de ces gens-là ? » On admet que ces personnes pourront de nouveau rentrer en ville après que leurs maisons aient été désinfectées. Ils devront ensuite rester cloîtrés quelques jours chez eux.
Il a été décidé par les principaux habitants de la ville de faire un vœu à Saint Roch « Aux fins qu’il plut à Dieu d’apaiser son yre (sa colère) » On décide de faire don à l’église d’un chasuble à l’effigie de Saint-Roch, à cet effet le conseil apporte la somme de 40 livres, une quête sera par ailleurs effectuée dans les paroisses alentour sous l’autorité des sieurs Santussans et Prouho, membres du conseil politique.
Par ailleurs, vu que la maladie contagieuse touche Bondigoux et Mirepoix, un garde nommé Nicolas Miquel a été placé à la porte Notre-Dame pour empêcher « La fréquentation quy se pourroict faire entre les habitans desdicts lieux et ceux de la present ville et qu’ilz n’entrent dans icelle » Pour cela il lui sera donné 7 livres par mois.

Le 17 juin 1629, à Toulouse, tous les malades soignés à l’hôpital Saint-Sébastien des Pestiférés meurent par contagion.

saint roch

6. Saint-Roch tenant son bourdon et montrant sa plaie

Pendant les guerres de religion, le chapitre collégial de Saint-Etienne du Tescou chassé de Montauban par les protestants en 1561, trouve refuge à Montech en 1562, puis à Villemur l’année suivante où il officiera dans la chapelle de Saint-Roch. De quand date cet oratoire ? Peut-être du XIVe siècle où la peste a sévi dans la région, Saint-Roch étant invoqué par les fidèles pour les protéger de la maladie. Christian Teysseyre situe cette chapelle dans la rue de la Crugarie, l’actuelle rue du Pech sur les hauteurs de la ville. C’est en ce lieu que la foule se rassemble à l’occasion d’événements majeurs comme en mai 1610 après l’assassinat d’Henri IV ; on y célèbre aussi des épisodes plus joyeux comme la naissance du dauphin de Louis XIV en décembre 1661. Selon la coutume, processions, chant du Te Deum, et feux de joie accompagnaient ces épisodes.
Dans un lointain passé il existait également une porte et rue Saint-Roch – portées sur le compoix de 1585 – devenues après 1627 porte et rue des Stradelis. De nos jours, dans le même quartier, existe la rue de la Porte Saint-Roch, ancienne rue Caillol.

 Les saints protecteurs : l’Eglise voyait la peste, comme le résultat du courroux divin. Afin de se protéger de cette colère, la vierge Marie et certains saints protecteurs devaient être priés. La Vierge était régulièrement invoquée pour son rôle protecteur en temps de peste. Mais plus que Saint Sébastien, c’est surtout Saint Roch (1295-1327)  qui fut considéré comme le Saint de la peste. Ce dernier aurait étudié la médecine à Montpellier puis partit en pèlerinage à Rome. En chemin, il contracta la peste  et fut guéri par l’intervention d’un ange.  Il n’en fallait pas plus pour qu’il devienne le protecteur des personnes atteintes de la peste. Beaucoup de représentations de ce saint ont été recensées en peinture sur lesquelles on peut voir un bubon souvent à mi-cuisse, la pudeur de l’époque empêchant que l’on voit au-delà .

à suivre….

JCF / AVH Juillet 2020.

Mes remerciements :
– pour l’excellent travail de notre collègue Yolande Quertenmont, dont les compétences en paléographie lui ont permis  le décryptage des délibérations consulaires.
– pour Jean-Charles Rivière et ses remarquables transcriptions des actes notariés de Villemur.

Notes :
(1) Les premiers consuls connus à Villemur, 22/3/1243 sont au nombre de 4 (Simile Juramentum de Villamuro, Layettes T II n° 3043 cote J. 305. Toulouse, III, n°21)
(2)  Christian Teysseyre relève qu’à Villemur,  comme à Rabastens,  les pestiférés sont mis à l’écart proche d’une briqueterie/tuilerie : « Faut-il établir un lien entre ce fait de la proximité de la briqueterie et ce que rapporte  le Docteur Jacques Frexinos, à savoir qu’à Toulouse aux Sept-Deniers , rapporte qu’à Toulouse, aux Sept-Deniers?  on construisit un four, une sorte de sauna où les malades venaient pendant un quart d’heure s’allonger et s’essuyer avec du linge propre pour faire tomber la crasse qui adhérait à leur peau. » (Histoire des Hôpitaux de Toulouse).
(3) Dans l’Ancien Régime, on exige des chirurgiens plus d’habileté manuelle que de connaissances théoriques. Ce sont pour beaucoup de modestes praticiens ayant acquis l’essentiel de leur savoir grâce à l’apprentissage puis à l’expérience. Aux XVIe et XVIIe siècles, le chirurgien est le plus souvent chirurgien-barbier. Il s’occupe des soins du corps mais aussi du rasage de ses clients, voire de l’entretien de leurs perruques.

Illustrations :
1 : source : de Toulouse, www.archives.toulouse.fr; 2: J-C François (Histoire de Villemur t2 AVH); 3: http://e.boonafoux-amvd.chez-alice.fr 5: J-C François;  4,6: Wikipedia

Sources :

– Amédée Sévène Notice sur Villemur Imprimerie Brusson Jeune, 1898
– Christian Teysseyre « Nouvelle histoire de Villemur » Tome 2 p. 773-775.
– Commune de Villemur-sur-Tarn. 1 D 1 : registre des délibérations du conseil municipal, 1622, 8 avril-1631, 10 mars
– Didier Foucault- Sylvie Mouysset Ordre et désordre de la peste dans le Midi Toulousain au XVIIe siècle Cahiers du Centre d’Etudes d’Histoire de la Médecine, n° 14, 2006, p. 15-38
– Joseph Roucaud : La peste à Toulouse des origines au XVIIIe siècle Toulouse, J. Marqueste, 1919.
– Mairie de Toulouse. https://documents.toulouse.fr/
– https://www.chu-toulouse.fr/la-peste-et-la-1ere-restructuration-du-xiveme

 

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