Au nord de Toulouse, une de plus belles friches industrielle de la région sera réhabilitée en logements

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Après des années d’attente, la ville annonce avoir trouvé deux porteurs de projets sérieux. /Photo DDM E.H

l’essentiel Plus personne n’osait y croire. Il semblerait pourtant que les anciens établissements soient sauvés. Le 29 juin, le conseil municipal choisira l’un des deux porteurs de projets approchés par la Ville pour imaginer une nouvelle vie à l’une des plus belles friches industrielles de la région.

La friche Brusson va-t-elle enfin être sauvée de sa destruction par le temps?Réponse du maire: oui! Jean-Marc Dumoulin ne met désormais plus de conditionnel. Il annonce qu’il présentera deux porteurs de projets, le 29 juin, aux élus du conseil municipal. À l’issue de la séance, on devrait donc connaître celui qui s’engagera à donner une seconde vie à l’une des plus belles friches industrielles de la région, lui évitant qu’elle ne tombe dans l’oubli ou, pire, dans le Tarn. Car c’est bien ce qui risque d’arriver à ce témoin du passé glorieux de la ville (Lire ci-dessous) si l’on ne prend pas soin de ses murs. «On ne pouvait plus attendre. Comme on l’avait dit au précédent mandat, on s’est donc mis en quête, d’un porteur de projet sérieux. On en a trouvé deux.Il reste maintenant à faire un choix» , lâche le maire. Sans dévoiler les détails, Jean-Dumoulin confie que les groupes intéressés sont Essor et de Kaufman & Broad. Les deux professionnels de l’immobilier pourraient, soit présenter «un projet global, soit sur une partie.Il s’agira de logements et de locaux commerciaux ou des startups ». Dans tous les cas, les deux devront supporter les contraintes qui ont fait fuir d’autres prétendants. Elles sont lourdes. Il s’agit ici de créer des logements… sauf en rez-de chaussée où la loi PPRI n’autorise pas une occupation permanente; Il faut occuper aussi seulement 2500 m2, et surtout, préserver divers éléments de cette friche classée par les Bâtiments de France dans laquelle rien ne devra se faire à la légère.

Lourds investissements

Seuls des investisseurs aux reins solides peuvent donc prétendre rajeunir et occuper Brusson, un tel projet étant estimé entre 15 et 20 millions d’€. De son côté, la Ville, devra se satisfaire d’une vente à un prix «raisonnable».On parle aujourd’hui d’une transaction à 500 000 €. Déjà bénéficiaire du Fond Friches obtenu par le député Portarrieu, elle a touché 575000 € qui, dit le maire « serviront au désamiantage et à la sécurisation des lieux».Ce dernier point est devenu une priorité pour la municipalité qui a déjà investi plus d’un million d’€, au fil des ans, pour maintenir debout Brusson.«Malgré tout, le vieillissement du site s’est accéléré depuis l’incendie de 2014.Depuis, c’est tous les mois que l’on constate une nouvelle dégradation»,précise Daniel Régis, adjoint au maire en charge de la Transition énergétique et du Tourisme patrimonial. Reste maintenant à concrétiser ces paroles.Mais il semblerait bien que la deuxième vie de la friche ne soit plus une utopie. Le maire , en tout cas, en est convaincu: «Dans trois ans, Brusson sera réhabilitée».

Brusson , une histoire ancrée dans les mémoires et les murs

Première usine

La famille Brusson apparaît à Villemur-sur-Tarn à la fin du XVIe siècle. C’est au XIXe siècle qu’elle va s’impliquer dans la vie de la cité. Après la défaite de la guerre de 1870, Arnaud Brusson et son fils Jean-Marie Elie fondent une usine de fabrication de pâtes alimentaires. D’abord installés rive droite dans la Tour du Moulin, les locaux se révèlent très vite insuffisants.

Renommée internationale

Dès 1875, les fabrications sont transférées rive gauche dans les bâtiments de l’ancienne ferronnerie devenue usine Courthiade. C’est là que Jean-Marie Elie Brusson bâtit son empire et crée un complexe industriel de renommée internationale.

Succès du gluten

En 1883, une amidonnerie de blé permet d’obtenir le gluten de blé nécessaire à la préparation des pains de gluten pour les diabétiques.Ce produit connaît le succès jusqu’à la guerre de 1914-1918, dans de nombreux pays notamment en Angleterre.

Brusson éclaire Villemur

En 1885, la voie ferrée Montauban/Saint-Sulpice-la-Pointe s’ouvre au trafic et dessert l’usine pour son approvisionnement en matières premières (blés d’Ukraine et d’Afrique du Nord) ainsi que pour l’expédition des produits finis. Dans la foulée, le moulin de la rive gauche est transformé en usine électrique: Villemur est éclairé gratuitement en courant continu par les établissements Brusson !

Brusson en politique

En 1895, une petite cité ouvrière pour les contremaîtres qui sont recrutés hors de Villemur sort de terre. Jean-Marie Elie Brusson est élu maire en 1896 et le restera jusqu’en à 1907. Il est aussi conseiller général de la Haute-Garonne en 1901. À son décès en 1916, son fils unique Antonin lui succède à la tête de l’entreprise. André Brusson est nommé cogérant de la société en 1925.

Brusson et les ponts

La construction du premier pont suspendu de Villemur avait été confiée à Jean Brusson, alors entrepreneur.L’ouverture a eu lieu le 9 novembre 1834. L’autre fils , Arnaud, se spécialise lui aussi dans la construction des ponts et réalise, entre autres, celui de Bessières et celui de Mirepoix-sur-Tarn effondré en 2019 sous le poids d’un camion trop lourd.

600 personnes avant Panzani

En 1908 est édifié un vaste bâtiment, minoterie et semoulerie, dernière grande réalisation et “cathédrale” industrielle des établissements Brusson.Ralentie par la terrible inondation de 1930, l’activité reprend son cours. La guerre 39-45 n’empêche pas l’usine de poursuivre son développement avec la fabrication de biscottes et du fameux Novamyl, un entremets qui représentera longtemps un fort pourcentage des ventes Brusson Jeune. À ce moment, environ 600 personnes travaillent dans l’entreprise. À l’orée des années 70, Brusson Jeune se trouve isolé et doit céder sa marque à Panzani. Après l’arrêt de la fabrication des pâtes alimentaires en 1972 on ne conservera à Villemur que la fabrication de quelques spécialités dont les célèbres Cheveux d’Ange.

Les dernières années

En 1980 Brusson n’emploie plus que 120 salariés. En 1983, l’entreprise se lance dans la fabrication de biscottes et de pain de mie. En 1999 Brusson Jeune devient la Financière de Villemur mais dépose le bilan en 2006. Les Cheveux d’Ange, passé sous la bannière espagnole Brussanges terminent leur vie à Bessières où la célèbre machine fabriquée à Villemur est carrément emportée par la société.Ils disparaissent en 2018.Fin d’une longue aventure… Mais pas d’une histoire gravée dans les mémoires et des murs toujours debout.


E.H

Nos plus vifs remerciements aux Amis du Villemur Historique (A.V.H) dont l’immense collecte de documents (un vrai travail de fourmis!) et l’extrème gentilesse nous ont permis la réalisation de cet article.

Article signé Emmanuel Haillot publié dans « La Dépêche du Midi du 06/05/22



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